Constance d'Orsenac

Cher Antoine,

Je sais, je réponds bien tardivement à vos poèmes. Je vous prie de m'en excuser, je me suis un peu retirée du monde en fin d'année, puis s'en est suivi un voyage qui dure, qui dure. J'espère que vous me pardonnerez ce temps de réponse.
Il me semble que je ne vous en avais demandé qu'un seul non ? Mais deux pour le prix d'un seul, j'ai vraiment de la chance. Je vous en remercie, ceux ci sont très beaux.

Comment vous portez vous Antoine ? Etes vous toujours en Bourbonnais-Auvergne ? Embettez vous toujours ma belle soeur ? Soyez gentil avec elle, sinon je vous défierai en lice ! Bon, pas pour tout de suite, je ne suis pas prête de revenir en BA.

J'espère que vos mots écrits dans cespoèmes ne sont pas pensés réellement, je m'en voudrai de devoir vous briser le coeur. Je n'aime guère faire de mal aux personnes que j'apprécie.

Prenez soin de vous Antoine. Ey si vous voulez me répondre, essayez de ne pas mettre autant de temps que moi.

Je plaisante, faites comme bon vous semble.

Que le Très Haut vous bênisse.

Constance d'Orsenac

Ma chère Constance,

Je comprends tout à fait. La fin d'année est toujours une période difficile dans laquelle il peut être inconvenant de trouver le temps ou la santé pour se retrouver. Vous n'êtes pas à blâmer. J'hésitais même à vous écrire dernièrement pour être honnête, afin de donner quelques nouvelles.

Ne vous plaignez pas d'avoir eu deux poèmes, je serais bien tenté d'en reprendre un pour la peine! Le deuxième par exemple.

Parce qu'en effet, je me porte très bien. Je vogue à travers les campagnes pour rejoindre le ban. Malheureusement, je n'embête donc votre belle-soeur uniquement par des missives intempestives pour lui rappeler à quel point je lui manque. Ainsi, n'hésitez pas à venir me défier en lice, mais attention, j'ai la lame tranchante. Une robe pourrait facilement être ouverte plus que souhaité, et je doute que ce soit ce que vous cherchiez, bien que cette simple pensée paraisse charmante. N'oubliez pas que je suis une fine épée et par dessus tout, un ancien croisé, eh !

Je dois vous faire une confidence. Les mots écrits dans ce poème portaient en eux une once de vérité, je ne vais pas le nier. Nombreux sont les Auvergnants qui étaient au courant de l'attrait singulier que je possédais pour votre personne. Mais point de crainte sur ce sujet et au risque de blesser mon coeur. Celui-ci a déjà été conquis. En effet, le temps a été long depuis votre missive et j'ai rencontré l'amour. Il s'est présenté sous un visage que vous devez connaître. C'est une jeune femme blonde, non ce n'est pas Marguerite, qui est actuellement Dame de Compagnie pour Laure. Un simple poème m'a accordé une rencontre et de fil en aiguille, nous sommes tombés sous le charme l'un de l'autre. Aujourd'hui, nous vivons notre amour et nous projetons un mariage dans un futur très proche. A huit clos, avec uniquement les témoins. Car l'intimité du moment est ce qui nous semble le plus important. Et vous ? Comment vous portez vous ? Allez-vous mieux à présent ?

Je vous souhaite tout le bonheur du monde Constance. Vous êtes une personne charmante. Le rayon de Soleil de bien des gens. Votre prestance est sans concurrence, et je suis heureux de vous connaître. Entourez-vous bien, vous le méritez.

Avec toutes mes amitiés,
Antoine von Hohenstaufen

P.S. Essayez de répondre en moins de deux mois cette fois! Il se passe tellement de choses qu'il devient difficile de tout résumer dans une seule lettre!

Antoine, cher Antoine.

Voyez que vous êtes fort mauvaise langue, je vous réponds au bout d'une semaine. J'espère que vous vous portez bien, pour ma part, je viens d'arriver au Mans et je me porte parfaitement bien.

Je suis heureuse de savoir que vous avez trouvé le bonheur. Et si j'avais su à l'époque que vous aviez quelques attraits envers ma personne, je ne vous aurai pas réclamé ce poème que vous m'aviez promis. Mais à présent c'est du passé, et je suis heureuse pour vous. Qui est donc cette heureuse élue ? Je dois peut-être la connaître si elle est dame de compagnie de ma mère. Cependant, je serai bien incapable de vous donner le nom de ses dames ou demoiselles de compagnie.
Vous projetez de vous unir devant le Très-Haut ? Cela doit donc faire longtemps que vous êtes avec cette personne pour penser déjà à vous unir, et vous ne m'avez même pas informée de l'heureuse nouvelle auparavant ? J'en suis fort déçue.

Pour ce qui est de se défier en lice, vous pourriez être étonné. Je porte aussi bien les robes que l'armure. Combattre les angevins est un de ces petits plaisirs qu'offre la vie, ainsi que jouter. Au risque de vous décevoir, ou de vous surprendre peut-être, je ne suis guère seulement une femme de salon. Et c'est vous qui risqueriez de vous retrouver avec un coup d'épée au séant. Ce serait un peu dommage de vous abîmer avant votre future union Antoine, ne croyez vous pas ?

Peut-être nous reverrons nous un jour, mais je ne saurai vous dire quand. Sachez que vous êtes une personne que j'apprécie, pas seulement pour vos jolis compliments, pour lesquels je vous remercie, mais vous avez cette chaleur naturelle dans le coeur qui émane de vous et vous donnez de la joie aux autres. Depuis que je vous connais, c'est toujours ainsi que je vous ai vu. C'est tout, n'espérez pas plus de compliments de ma part, c'est déjà beaucoup.

Je vous souhaite beaucoup de bonheur Antoine, prenez soin de vous.

Que le Très Haut vous garde.

Constance d'Orsenac


PS : Et je ne suis pas déçue de ne pas avoir été mise dans la confidence.

Constance, douce Constance,

Vous étiez au Mans et vous n'avez pas pris la peine de venir me sortir du monastère ! Diantre, que cela est dommageable. Vous auriez pu profiter de ma charmante présente en taverne pendant de longues heures. Surtout qu'il paraît que j'ai la main lourde lorsqu'il s'agit de payer des tournées. Puisque vous n'êtes guère femme de salon, je pense que cela aurait pu vous convenir.

Je suis presque certain que vous connaissez celle-ci puisqu'il s'agit de Lise. Inutile de compliquer son identité avec son nom puisqu'elle prendra bien assez vite le mien. Même si elle juge qu'il est imprononçable. Eh. Le mariage est bien souvent la consécration d'une longue relation, une suite logique. Ici, pour être honnête, nous le voyons comme un commencement. Le début d'un nouveau chapitre après avoir vaincu toutes les péripéties, nombreuses, qui se sont hissées devant nous. Il s'agit de la porte où nous nous libérons totalement des emprises, pour pouvoir nous consacrer pleinement et entièrement à notre unique amour. Aucun doute n'habite mon esprit, mon coeur bat fort à chaque fois que je l'aperçois, et rien que l'idée de la savoir loin de moi déchire chaque jour mon coeur. Alors pourquoi ne pas précipiter l'Union ? Nous savons tous les deux qu'il s'agit de notre désir, de notre volonté. Nous avons déjà tellement traversé...

Mais inutile que je vous embête plus que nécessaire avec tout cela. Revenons au sujet de la lice. Si vous décidez de venir avec une armure face à moi, c'est que vous savez que vous êtes déjà perdante. En effet, cet accoutremment ne ferait que vous alourdir et vous rendre inefficace. En somme, il ne ferait que vous protéger de coups reçus, sans vous donner l'opportunité d'en redonner. Puisque dans mon cas, je serais vêtu de mon accoutremment de tous les jours. Mais je ne voudrai prendre le risque d'abîmer votre si joli visage. Cela n'en vaut pas le coup. A la place, je propose qu'on règle cela aisément autour d'un verre, lors d'une rencontre aimable et chaleureuse. N'est-ce-pas plus agréable ?

Pour ce qui est de se revoir, il me semble que vous êtes dans la même ville que ma bien aimée. Ainsi, il n'y a aucun doute sur le fait que nos chemins se croiseront bien assez vite à présent. Et sûrement à de nombreuses reprises. De toutes façons, la famille Troy-Orsenac étendue (comprenez donc également votre branche Orsenac) subit une malédiction qui l'empêche de pouvoir rester tranquille loin de moi très longtemps. Vous devriez demander à Hector, je crois qu'il n'est pas loin de ne plus pouvoir me supporter à force. Faut dire que le pauvre a eu la malchance d'être marié à Ines, qui est malheureusement une de mes très bonne amie. Par conséquent, le pauvre est coincé avec moi qui lui rappelle son malheur d'être roux. Mais bref, Totor n'est pas le sujet. Nous disions donc que vous alliez m'inviter pour pouvoir déclamer un poème à mon effigie en vertu de mon union prochaine avec la charmante Lise, c'est bien cela ?

J'attends que vous régliez les détails alors.

Que le Tout-Puissant vous inspire,

Antoine von Hohenstaufen